Équipe de France

Mathilde Gros pose ses valises en Nouvelle-Zélande 

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Mathilde Gros a donc retrouvé des sensations après une longue période difficile, et décroché une médaille d’or en keirin sur la Coupe des Nations disputée à Konya, en Turquie. À l’aube de cette nouvelle olympiade qui conduira à Los Angeles 2028, l’ex-championne du monde de vitesse quitte momentanément le pôle olympique de SQY où elle s’entraine habituellement, pour d’autres horizons, à commencer par la Nouvelle-Zélande, où elle s’installe pour deux mois.

Avant de devenir championne du monde de vitesse en 2022, elle avait déjà dû surmonter une première fois les pièges tendus sur sa route par les espoirs impatients qu’on plaçait en elle. Depuis lors, Jeux Olympiques à domicile obligent, le poids des attentes s’est à nouveau accumulé sur ses épaules, avec le résultat que l’on sait. Certes, Mathilde Gros est une surdouée du sprint, mais elle doit faire aussi avec l’envers de ses qualités de gentillesse et d’ouverture : elle est sensible et soucieuse de tenir les promesses qu’on fait à sa place. Il est des fragilités qui vous honorent. 

Ainsi l’échec de Paris 2024 a-t-il été particulièrement difficile à surmonter. Très déprimée, elle n’était « pas sûre de vouloir continuer », se « demandai[t] ce qu’elle faisai[t] là » et avait traversé tant bien que mal sa fin de saison, s’alignant, sans grand succès non plus, aux championnats du monde de Ballerup et sur la Track Champions League. Depuis lors, on ne l’avait plus revue en compétition, elle avait fait l’impasse sur les championnats de France, puis d’Europe, gérant de petites blessures dont il est difficile de nier l’origine à la fois psychique et somatique : « J’ai décompensé » résume-t-elle sobrement, avant d’analyser plus avant la fatigue accumulée : « avant Tokyo, on s’était entraînés de fou et après Tokyo, on n’avait pas coupé, on avait enchaîné direct pour Paris 2024. » 

Évoquant ses sensations perdues, elle raconte  être passée par de drôles de moments : « C’était très étrange, tout se passait comme si mon corps lui-même ne se souvenait plus. Cela m’a beaucoup stressée, à nouveau. » De plus, en plein remaniement des staffs de l’Équipe de France, il était « compliqué de faire un bilan toute seule. Je ne savais plus ce que je valais. »  
La meilleure sprinteuse française n’était donc pas sereine à l’idée de s’aligner sur la Coupe des Nations de Konya (Turquie.) « Au début, j’avais l’impression que ça faisait 5 ans que je n’avais pas couru, quoi ! » 
Pourtant, elle est un peu déçue de son temps en qualif’, ce qu’elle interprète rétrospectivement comme le signe qu’elle est « toujours compétitrice, au moins !» Le tournoi de vitesse n’est pas si mauvais, au sens où elle passe à deux doigts d’intégrer le carré final : ce n’est qu’au terme des 3 manches qu’elle s’incline finalement devant l’Italienne Miriam Vece, qui venait de sortir Lea Sophie Friedrich. 
 
Pour la Française en pleine reprise, les journées sont longues, la fatigue se fait sentir. « On arrivait au vélodrome à 8 heures, et après les matches s’enchaînaient au fil de la journée. C’était dur. Pourtant j’ai pris du plaisir sur le vélo. Même en match. J’ai touché mes limites physiquement, mais je parvenais à manœuvrer comme je voulais. » 

Le lendemain, au départ des qualifications du keirin, la fatigue est bien présente. Mais elle se motive. « C’était super chaud (sic), parce que seule la première – non pas les deux premières comme c’est habituellement le cas – se qualifiait pour le tour suivant. Il fallait absolument gagner pour passer. Cela impliquait des choix tactiques différents. Mais je n’avais rien à perdre. » 
Tout se passe bien, jusqu’à ce qu’elle voie la Russe Lysenko la sauter sur la ligne. « Lysenko, c’est pas n’importe qui. Sur la TCL, elle nous avait éclatées (sic), explique-t-elle. Mais j’étais partie en 6ème position, j’avais cru gagner puis… bref, j’étais déçue. Mais Anthony [Barré, l’entraineur de l’Équipe de de France] est venu me dire qu’elle avait été déclassée pour manœuvre dangereuse. »

Arrivée en finale, alignée face à la crème de la discipline ( la Japonaise Mina Sato championne du monde en titre, la Chinoise Liying Yuan, première femme à passer sous les 10’ au 200m, etc.), Mathilde a joué le tout pour le tout : « Je me suis dit que les finales de keirin que j’avais finies à la 6ème place, je pouvais les compter sur les doigts des deux mains. Ça m’a libérée, et j’ai fait la course presque parfaite, je crois. J’ai gagné. C’était trop bien. » 

Cette nouvelle médaille d’or en Coupe des Nations, la Française l’a reçue comme un baume. La voilà rassérénée à l’aube d’une nouvelle olympiade
Avant de – et pour pouvoir – s’y projeter plus précisément, elle a décidé de prendre un pas de recul (tel le peintre qui organise son tableau selon les règles de perspective !) À l’invitation de la double championne olympique Ellesse Andrews, la voilà donc partie pour deux mois d’entrainement en Nouvelle-Zélande. « J’étais allée au Japon en 2018 et 2019, à chaque fois ça m’avait fait le plus grand bien. Donc, oui, je m’extrais du pôle olympique, pour quelques mois qui vont coïncider avec une période de remaniement de la DTN, et puis nous verrons comment organiser au mieux les choses. Je crois qu’il nous faudrait une stratégie pour anticiper et désamorcer le stress excessif qui saisit tout le monde, du staff aux athlètes, à l’approche des JO, et qui est très dommageable. Il faudra être capable de garder son calme – et son plaisir. »