Championnats de France

Sous le soleil exactement : Marion Bunel et Ugo Fabries champions de France U23 !

L’épisode caniculaire continue d’écraser la Tour du Pin et les humains qui y résident ces jours-ci. Sauf peut-être les coureurs cyclistes : eux y livrent d’épiques batailles. Après la victoire du comité de Bourgogne Franche-Comté hier sur le relais mixte, l’atmosphère surchauffée a livré aujourd’hui la championne et le champion des U23.

Sur les championnats de France de l’Avenir, chaque jour porte son lot de larmes, et de ce bouleversant brouet de sentiments porté à ébullition par la chaleur. Cet état de choc est fait d’une satisfaction extrême pourtant mitigée de déception, et de fatigue surtout. Après Camille Alric-Thouvenin la veille, c’est Louane Famy qui se remettait difficilement, hier, de cette explosion émotionnelle.

Le Relais Mixte à la Bourgogne Franche Comté

À l’arrivée du relais mixte, sous la tente du comité Bourgogne Franche-Comté, elle est restée assise au sol un long moment, le visage écarlate et les yeux rougis, hagards.
L’arrivée et les félicitations enthousiastes de Marine Strappazzon s’éjectant hors de sa voiture tel un diable à ressort, et même la confirmation de la victoire, la sortiront à peine de cette torpeur.

Louane Famy est championne de France du Relais Mixte sous les couleurs du comité BFC. À tout juste 15 ans, elle a admirablement tenu son rôle auprès de ses aînées Zélie Lambert et Charlotte Bouhier. Elle a certes fini par craquer, mais après avoir assuré sa part.
« Rends-toi compte, tu as fait un sacré chrono  ! » lui disait Marine Strappazzon en lui tenant le visage à deux mains.

Les Noirs-et-Jaunes s’étaient astreints à deux jours de stage la semaine précédente, histoire d’ajuster au millimètre le ballet des relais. Les garçons, Théophile Vassal, Tom Champenois et Timéo Gantois, se connaissent de longue date, mais les derniers réglages sont toujours susceptibles de faire la différence.

Le « two women show » de la course U23 Femmes

On s’est d’abord dit qu’elles n’avaient pas le sens du spectacle, ces deux-là : partir si tôt et creuser un si grand écart, c’est-à-dire, réduire à néant le suspense : franchement, c’était nous priver de drame !
C’était sans compter sur leur capacité à occuper la scène à deux, et à nous improviser un dénouement de toute beauté.

Marion Bunel et Célia Géry passèrent l’essentiel de la course à unir leurs efforts à flux continu, dans une sorte d’expression sereine de leur supériorité. Soft power !
Mais à un peu plus d’un tour de l’arrivée, Marion déclencha l’offensive, plaçant une double accélération dans la terrible côte de Béjuy, mais Célia passait une troisième couche (épaisse) et semblait s’envoler.

La coureuse du comité AURA passait en tête sur la ligne à l’amorce du dernier tour. Mais, sous le maillot rouge et or du comité de Normandie, son adversaire du jour revenait dès avant le pied de la longue montée qui inaugure le tour de circuit. Elle reprenait le leadership et creusait immédiatement l’écart en sa faveur, définitivement cette fois-ci. Marion Busnel radieuse s’octroyait donc son premier titre de championne de France.

Quelques jours après avoir œuvré à la victoire de Pauline Ferrand-Prévot, sa leadeuse, sur le Tour de France Femmes avec Zwift, la grimpeuse normande est entrée dans la lumière.
« Il est possible qu’après avoir roulé si vite sur toute la durée du Tour, j’aie passé un cap, ou qu’une sorte de surcompensation se soit produite », expliqua-t-elle avant même de rejoindre le podium protocolaire.

Quant à Célia Géry, elle ne se cherchait pas d’excuse, s’avouant battue par « plus forte que [soi]. » À peine regrettait-elle ce dont on lui demandait si ce n’avait pas été une erreur « J’ai bien pensé aussi que si j’avais placé cette attaque au tout dernier tour [à 3km de l’arrivée, ndr], j’aurais eu une chance d’aller jusqu’à l’arrivée. Mais la question est plutôt de savoir si j’aurais pu suivre Marion dans la longue bosse [montée du Ronfet, ndr], et rien n’est moins sûr. » La jeune recrue de FDJ-Suez expliquait aussi avoir « fait sa coupure hivernale » (sic) après le Giro, et n’être pas tout à fait revenue à son top.
Concernant la troisième marche du podium, c’est une Églantine Rayer-Girault épanouie qui se l’attribuait finalement aux dépends de Clémence Latimier, en compagnie de qui elle s’était isolée du reste de la troupe. Derrière les quatre coureuses du World Tour, Solène Muller décrochait une belle 5ème place. A 11 minutes de la lauréate.

Fabries frais dans la fournaise

On se doute qu’entre la fin de matinée et le début d’après-midi, le thermomètre s’est encore haussé du col. Et quant à savoir ce que 38°C à l’ombre font à un corps humain, ne vous comparez pas aux coureurs cyclistes, qu’il faut décidément séparer du commun des mortels. Alors qu’à 14 heures ces messieurs s’élançaient pour 160km, les rues désertes de la Tour du Pin tremblaient sous l’été, et nous autres spectateurs passionnés suions, ne nous déplaçant que d’un coin d’ombre à l’autre.

Ugo Fabries, le nouveau champion de France U23 ne nous avait pas encore dit qu’il n’avait « pas spécialement souffert de la chaleur, tant les ravitaillements étaient bien organisés. »
Néanmoins les dégâts sur le peloton furent rapidement manifestes : à 100km de l’arrivée, il ne restait en course que la moitié des partants, et seule une trentaine de coureurs pouvaient encore prétendre à la victoire !

D’écrémage en écrémage, ce petit peloton s’étiola, et à trois tours de l’arrivée, ils n’étaient plus qu’une douzaine de champions encore possibles.

Avant le dernier passage sur la ligne Ugo Fabries (Occitanie) plaçait une première attaque. Le Toulousain sortait seul de la côte de Béjuy, mais talonné par Adrien Boichis (Région Sud) qui parvenait à recoller dans la descente. Les deux hommes se connaissent bien pour avoir été coéquipiers l’an passé chez Trinity Racing – ils comprenaient vite qu’ils ne seraient pas repris et se disputeraient le titre.
Logiquement, l’ultime ascension de Béjuy les départagea.

Chacun des deux savait combien l’autre peut exceller sur ce type d’effort. Et le coureur de la Région Sud avait sans doute été trop prodigue : « Je commençais à cramper. Je n’ai sans doute pas été suffisamment intelligent, je me suis trop excité, et trop tôt. Mais avec des ‘si’ on refait le monde, et le fait est qu’Ugo était le plus fort dans cette dernière montée. Je suis content pour lui », expliquerait-il après l’arrivée.

Le vététiste passé à la route (il est champion de France Espoirs de XCO) est un idéaliste, qui vit son sport dans l’intimité d’une quête personnelle consistant dans le plein et parfait déploiement d’un potentiel idéalisé. Boichis veut devenir « la meilleure version de lui-même », comme on dit. Il y met toute son énergie, son âme, et la méthode qui le caractérise.

De fait, aujourd’hui c’est l’Occitan qui aurait raison de l’excité (comme il le dit lui-même) signant la victoire la plus significative de sa jeune carrière, et faisant étalage de qualités qui n’ont pas échappé aux recruteurs d’UAE Team Emirates Gen-Z.

De ces deux-là, comme d’Antoine Lhote venu chercher la 3ème place, on reparlera à coup sûr. Car, s’il n’existe pas de championnats au rabais, la difficulté de ce millésime 2025 était particulièrement significative.