Enzo Conan et Thaïs Barrier-Paiva champions de France U17

Il a fait chaud déjà – déjà très – ce jeudi, à la Tour du Pin, pour les épreuves U17 hommes et femmes de ces Championnats de France de l’Avenir 2025. Les talents et les qualités soumis à la chaleur ont livré des vainqueurs inattendus, mais pleinement méritoires !

Ce jeudi matin à la Tour-du-Pin, c’est le climat lui-même qui semblait s’être glissé dans la peau d’un adolescent versatile. Hier pour le chrono l’air était frais et le ciel ne pesait rien sur les épaules profilées des coureurs. Aujourd’hui une chaleur de plomb écrasait le paysage, et le vent faute de rafraîchir desséchait leurs bouches ouvertes quémandant à la fois l’eau et l’air.
Indépendamment des caprices météo, la difficulté du circuit tenait à son profil.
Deux bosses bien différentes l’une de l’autre : la première longue, exposée, dont le somment inspirait au peloton de légers et dangereux relâchements, dont profitaient les plus frais : c’est, non pas dans les difficultés mais sur les parties de transition que se sont dessinées les offensives. La seconde, à 3 kilomètres de la ligne, se dressait toute raide entre deux descentes, requérant une bonne dose de ce punch pourtant corrodé par la chaleur.
Grappes trop mûres
Pas effrayés le moins du monde par ces arides conditions, les U17 ont mis flamberge au vent et livré de belles batailles. De celles qui marbrent les maillots de traces salées, et font venir la chair de poule sur les bras des athlètes. La course des garçons, disputée la première, vit une échappée de 13 coureurs prendre tôt le large, puis se décomposer telle une grappe trop mûre, perdant un grain après l’autre.
Six rescapés tinrent pourtant la distance, mais furent repris dans le dernier tour par six contre-attaquants, menés à bride abattue par Camille Alric Thouvenin (AURA) et Théo Rodriguez (Région Sud), notamment.

Ils étaient donc 12 en tête au pied du dernier raidard. Et 9 en haut, puis 8 à moins de 3km de la banderole. Aux 2 bornes, ils n’étaient plus que 4, puis à nouveau 6 à la flamme rouge.
La dernière ligne droite désignait le plus punchy, le plus frais, en la personne du Breton Enzo Conan, qui prenait le meilleur sur un Victor Devos (HDF) très en vue cette année, et Camille Alric-Thouvenin.
Tradition familiale

Les vieux le savent, Conan a de qui tenir. Non seulement après son grand-père Jean-Louis, redouté dans les années 1990, et son père Herman, mais aussi dans le sillage de sa mère Nathalie, 10 fois championne de Bretagne sur piste.
Enzo reprend donc à 15 ans, dans son style personnel, le flambeau de cette tradition familiale qui consiste à lever les bras sous une banderole d’arrivée.
Tradition de courage et d’entêtement, aussi : il dit avoir frisé les crampes dans la dernière bosse, et s’être « refait » dans la descente. Quand il a vu la ligne, ses muscles ont oublié la fatigue.
Assis à ses côtés Victor Devos semblait, disons, « raisonnablement déçu. » Fort de cette sérénité que lui apporte une saison déjà pleinement réussie (il est l’actuel leader du Trophée Madiot) et un contrat avec la réserve de Soudal-QuickStep, il reconnaissait quelques erreurs possibles mais se déclarait satisfait.
Camille Alric-Thouvenin, quant à lui, faisait la troublante expérience des sentiments mélangés. Effondré après la ligne d’arrivée, puis victime d’un léger malaise hypoglycémique, il ne savait, de la joie ou du chagrin, auquel attribuer ses larmes. « Passer deux fois en deux jours à côté du maillot, c’est une impression perturbante. » Il se consolera en pensant que, se fût-il agi d’une course par étapes, il serait vainqueur au général !
L’incrédulité de Thaïs Barrier-Paiva
Vaut-il de dire qu’à 14h30, lorsque les filles s’élancèrent, le mercure continuait de grimper aux rideaux ?
De fait le premier tour de circuit fit déjà du dégât, donnant le ton de la course.
Les conditions extrêmes bouleversent les corps au plus profond, obligeant chacun, favoris compris, à la plus grande humilité. Mais elles créent aussi des surprises, elles provoquent des révélations.
De fait, elle ne l’a que trop dit après la course, comme si elle avait du mal à prendre la mesure de sa propre performance, Thaïs Barrier Paiva n’était pas cheffe-de-file de la sélection Nouvelle-Aquitaine.

Encore moins se serait-elle vue gagner ! Et pourtant. C’est précisément comme ça, dans l’idée de bosser pour les autres, qu’elle s’est isolée une première fois à deux tours, soit 32km, de l’arrivée. « Sur le papier, je ne suis pas assez bonne grimpeuse pour avoir l’ambition de gagner sur un tel circuit » dirait-elle, une fois vêtue de bleu-blanc-rouge.

Une chose est sûre, c’est qu’elle roule, et qu’elle ne lâche pas l’affaire. Reprise une première fois après 10 bornes d’escapade, elle a insisté et créé à nouveau un petit écart. Qu’elle a poussé jusqu’à la minute, au pied de cette fameuse fichue dernière bosse. Là, elle a résisté à l’attaque fracassante d’Aziliz Sigalas. Quant à elle taillée pour la pente, la coureuse du Centre-Val de Loire bouchait 30 secondes sur cette seule accélération, mais butait dans la descente.
Ne restait plus à Thaïs Barrier-Paiva qu’à tenir bon, et à affronter la réalité si surprenante soit-elle : elle était devenue championne de France. Après l’arrivée, elle garderait longtemps ses lunettes, dissimulant ses yeux clairs, comme délavés par la joie et l’incrédulité.
À lire aussi

Enzo Conan et Thaïs Barrier-Paiva champions de France U17

Trois titres et six médailles : à Copenhague, la France règne sur les Mondiaux de BMX !

Dans le sillage de Pauline Ferrand-Prévot, les cyclistes françaises pèsent au plus haut niveau
