Championnats de France

France Route Amateurs Hommes : la maîtrise et l’exploit

Aux Herbiers, sur un circuit décidément plus rude que son profil sur papier ne le laisse à penser, les Amateurs nous ont à leur tour donné un récital. Théo Lévêque et le Vendée U triomphent indiscutablement, mais n’effacent pas l’exploit de Léandre Huck, passé à un cheveu.

Allez, n’ayons pas peur des grands mots. Plus qu’une science, le cyclisme est un art. Il recèle de ces subtilités littéralement inchiffrables, serait-ce par le calcul infinitésimal.
En cyclisme, la réussite, « ça tient à rien » ! Ainsi d’un coureur qui, quelques semaines en arrière peinait à s’entraîner au point de « faire demi-tour après 10 ou 15 minutes ».

Qui avait le sentiment de ne plus mettre une pédale devant l’autre, mais qui est remonté de ces profondeurs psychiques pour crever la surface, ici en Vendée, sous nos yeux « herbretés. »
C’est donc Théo Lévêque que ce mouvement ascensionnel aura projeté bras levés à travers le col et les manches du beau maillot bleu-blanc-rouge de champion de France des amateurs. Au terme d’une course qui, encore une fois, aura retenu son souffle jusqu’au seuil de l’évanouissement.
Car si le succès de Théo Lévêque et du Vendée U – qui place aussi Mathéo Barusseau sur la 3ème marche du podium – semble en référer à une maîtrise parfaite (et ma foi, ce n’est pas faux non plus), les Vendéens n’auront repris qu’à 500 mètres de la ligne le héros du jour.

Léandre Huck n’avait pas prévu de partir à 140 kilomètres de l’arrivée ni de se lancer dans une bataille homérique, il s’était même plutôt entendu conseiller d’attendre les deux derniers tours. Mais que voulez-vous, « ça s’est ouvert devant [lui]… », alors il a suivi, dans l’idée que le VC Rouen se devait d’être représenté à l’avant. Puis l’échappée a pris forme, puis elle a perdu des individualités au fil des tours.

Puis il n’est plus resté avec lui que l’étonnant Axel Salvadori.

Puis il s’est isolé en tête de la course, pendant que sur ses talons s’organisait une violente contre-attaque (dont Salvadori parviendrait à prendre les roues !)

Quand il s’est présenté pour la dernière fois au pied du mont des Alouettes pour les deux kilomètres les plus longs de sa vie, il pouvait sentir leurs souffles sur sa nuque. Mais il n’a pas plié. Il a fallu toute la giclette de Lévêque forcément plus frais, pour le priver du titre – mais pas d’inscrire son nom dans le marbre de l’exploit.


Et c’est en deuxième position qu’il franchit la ligne tracé entre la chapelle et les moulins, au sommet de la butte. À tête (à peine) reposée, il expliquerait s’être interdit, tout le temps de son périple, de « s’y voir », c’est-à-dire de s’imaginer franchir la ligne les mains en l’air, ou revêtir le maillot.
Du coup, il devenait difficile d’interpréter ses mots, lorsqu’il ajoutait, tel Saint Thomas en cuissard : « Je ne crois que ce que je vois. »
Dès lors, avait-il bien fait de ne pas s’y voir ??